Démocratie locale
La confrontation à une nouvelle expression des politiques locales et des actions publiques s'effectue depuis plusieurs années dans nos régions et en France en général. Ceci ce traduit par un nombre de grands enjeux collectifs contemporains pris en charge par les gouvernements locaux (conseil régional, conseil général, conseil municipal) et les collectivités territoriales dont la solidarité, la cohésion sociale, le développement économique, la protection de l'environnement, etc, représentent les principales « vitrines ». les actions entreprises par les autorités locales pour agir sur leur environnement social ou politique, c'est à dire les politiques locales, changent-elles les politiques publiques et favorisent-elles l'évolution de la démocratie ? Le renforcement des villes et des régions issu de la décentralisation dès 1982, et la signature de l'acte européen de 1992, a-t-il vraiment contribué à l'influence du local sur l'élaboration et la mise en oeuvre de programmes autonomes ?
A travers les réseaux d'action publique est apparu l'essor de contractualisation entre l'Etat et les collectivités locales. C'est le cas des contrats locaux de sécurité (CLS), des regroupements de communes par des communautés d'agglomérations. Pourtant, la gouvernance urbaine, c'est à dire le pouvoir partagé, est loin d'être la réalité (...). N'est-il pas illusoire aujourd'hui de rechercher la réalité d'une autonomie des institutions territoriales ? Le problème corse est l'illustration d'une antinomie universalisme / communautarisme. Du fait d'une administration toujours fortement centralisée, l'Etat limite le degré de liberté des collectivités territoriales. Pourtant, elles développent des politiques économiques instituées par les lois de décentralisation : contrats de Plan, aménagement du territoire, procédure européenne, politiques régionales communautaires, etc...
La complexité de l'espace du pluralisme institutionnel, confronte les collectivités territoriales et les pousse à la concurrence normative, engageant celles-ci dans des politiques locales innovantes devant intégrer les règles communautaires, les législations nationales, les normes locales et régionales. Ainsi s'exprime des dualités, parfois même des pluralités compétitives sous des expressions politico-économiques et culturelles -par exemple entre Toulouse et Montpellier, voire Bordeaux- ou d'affirmation culturo-identitaire entre Bayonne et Pau (Basque et Béarnais, etc...).
S'inscrivant dans un contexte local qui structure le leadership territorial, ces politiques suivent des règles relativement spécifiques dans les relations entre gouvernements locaux et l'Etat : Pau, leadership du Béarn et de la communauté d'agglomération ; Bayonne, leadership du Pays-Basque et du BAB.
Les tensions conflictuelles entre les acteurs multiples (élus, administration locales ou Etat) soulignent deux tendances majeurs sur l'action publique contemporaine des politiques locales : d'une part la complexité organisationnelles de ses dispositifs, d'autre part la faiblesse de l'implication des citoyens. L'attente du citoyen au niveau local se situe dans une réalité politique plus concrète que celle révélée par la décision gouvernementale : cas des annonces, au demeurant spectaculaires, quand il s'agit d'une baisse des impôts du contribuable, la suppression en partie de la vignette pour certains véhicules, mais pas tous ! Ou la baisse du chômage... sur un plan national et dans les statistiques, sans évocation de l'augmentation des emplois précaires, ou des temps partiels non choisis. Pourtant, dans la quotidienneté, il existe des existences plurielles : emplois polyvalents, familles monoparentales ou familles recomposées, PACS, mobilité, flexibilité, mixité sociale ou culturelle.
Les citoyens ne sont pas nécessairement plus proche de leurs élus locaux que des élus nationaux, susceptibles par ailleurs, d'apporter des médiations plus importantes. Le manque de structuration des problèmes perçus entre domaine privé et domaine public, révèle les faiblesses et les difficultés de l'action publique qui tente de diffuser sa réalité dispersée à tous les niveaux d'interaction, entre l'Etat, les collectivités territoriales et la société : ce sont les grands thèmes actuels d'éthique, bioéthique, les violences (violences privées : inceste, femmes battues ; violences publiques : scolaires, urbaines, professionnelles...). Faut-il y voir un mythe du terrain et de la proximité ? Notion chère à nos élus locaux.
Sans nier cette spécificité à la démocratie locale, quelle place, pour le citoyen, lui accorde t-on dans le débat politique, quelles implications et quelle reconnaissance ?
Christian FERRÈRE
Sociologue